Economie et société de l'île de Cadel
ne des particularités de l'île de Cadel est l'usage de la Magie, qui est pratiquée par presque tous, quoiqu'à divers degrés. En effet les mages qui ont choisi de se retirer en Cadel, probablement bien avant l'An 0 et même la Guerre des Gardiens, désiraient poursuivre leurs recherches et l'idée initialement instaurée était qu'elle ne devait pas être réservée à une minorité, au nom du principe selon lequel
la Magie est partout et en tous. Cela explique qu'encore aujourd'hui, tous les enfants, qu'ils soient issus de la noblesse ou des franges les plus viles de la société, apprennent à maîtriser les courants magiques.
De là découle la puissance magique que peuvent acquérir certains habitants de l'île. Ceux qui sont originaires de Cadel sont parfois perçus - non sans fondement, mais avec beaucoup d'exagération - sur Oneira comme des mages puissants, capables de bien plus que tous les autres.
Cependant au fil du temps, au fur et à mesure que le souvenir des actes des fondateurs s'estompait, l'idéal d'une Magie propriété de tous s'est altéré et des distinctions sont peu à peu apparues. Progressivement les dynasties héritières des premiers mages (pas forcément de bonne foi, semble-t-il...) ont imposé une sorte de magistère : leurs membres se considéraient comme les meilleurs praticiens de la Magie, une véritable élite de Cadel. Ces familles ont fini par se structurer en une noblesse magique qui, au nom de ses capacités, a prétendu avoir pour mission d'exercer un certain contrôle sur l'usage et l'apprentissage de la Magie.
Ainsi, vraisemblablement quelques siècles après l'arrivée des mages en Cadel, un système dual s'était instauré : d'un côté une caste qui comprenait les vieilles familles se targuant de descendre directement des mages d'antan et accaparant les postes d'instructeurs de Magie, de l'autre la masse du peuple, dont les liens avec la Magie s'étaient atténués, sans disparaître pour autant.
Selon l'hypothèse la plus couramment admise, la mise en place du système politique qui a perduré jusqu'à nos jours (quoiqu'il connaisse aujourd'hui des difficultés) serait postérieure à cette différenciation sociale et en découlerait. Dans ce cas, on s'accorde à penser que des tensions entre la "noblesse magique" et le reste de la population ont conduit à des affrontements qui se sont achevés par un compromis consistant en un équilibre de deux pouvoirs, le roi et le Conseil. Le premier aurait été le garant de l'unité de l'île, exerçant le pouvoir de justice, de police et faisant appliquer les lois ; il aurait été également le garant des droits du peuple, notamment du droit à l'éducation magique.
Le Conseil, quant à lui constitué de neuf Conseillers, aurait été l'émanation de la noblesse, le représentant des grandes familles, et aurait été l'institution en charge de tout ce qui touche à la Magie en Cadel. D'aucuns émettent toutefois une autre opinion, peu partagée : le Conseil aurait existé dès l'origine (il aurait permis de régler les conflits entre colons et autochtones) et c'est en raison de la mainmise des "nobles" sur lui que la royauté aurait été instaurée. Les Conseillers sont théoriquement nommés par le souverain mais, dans les faits, ce sont les intrigues au sein de la noblesse qui déterminent quel clan peut placer ses pions ; les Conseillers sont nommés à vie.
Entre le roi et le Conseil, les rapports ont parfois été sereins, parfois conflictuels, pour autant que l'on sache ; bien entendu, Cadel n'ayant eu que très peu de rapports avec Oneira jusqu'à une période récente, tout ce qui dépasse le cadre du conflit actuel (que nous n'aborderons pas ici) nous est presque inconnu. Il semblerait que la coexistence des deux pouvoirs se soit déroulée assez paisiblement durant la majeure partie de l'histoire de Cadel, le Conseil exerçant de fait le pouvoir (toujours en cherchant à préserver l'ordre ancien et des "traditions" qui, en fait, sont certainement postérieures à l'arrivée des mages en Cadel...), tandis que les rois semblent avoir plutôt avoir joué un rôle symbolique. Le centre névralgique du pays se situait donc à Cintai. Lors de règnes de souverains de plus grande envergure, ceux-ci pouvait prendre des initiatives, mais limitées.
En dehors de l'élite et de la propension à l'utilisation de la Magie, la population de Cadel ne se différencie guère de celle des autres pays : on y trouve surtout des paysans, des marchands, des artisans, des artistes même, et bien entendu toute une pègre diverse. En somme, tout ce qu'il faut pour faire une société.
Les hommes d'armes sont en revanche très peu nombreux : trois garnisons seulement existent sur l'île, à savoir le Corps du Roi et les Défenseurs de la Magie (chargés respectivement de la protection du roi et des Conseillers) et la garde civile, chargée de la police à Mercinel et de la surveillance des étrangers.
Le groupe des marchands connaît ces dernières décennies une prospérité sans équivalent, due à la politique menée par les deux derniers souverains de Cadel qui favorise ouvertement leurs intérêts.
Ces derniers siècles, enfin, est apparu un nouveau groupe social, les alchimistes, qui affirment être des hommes de science dont la vocation est l'étude du monde tel qu'il est (le ciel et les étoiles fascinent particulièrement les alchimistes de Cadel). A ce titre ils sont régulièrement opposés aux mages. Issus des couches aisées mais non nobles, les alchimistes sont depuis un siècle des soutiens fidèles des rois réformateurs Petrul et Lyander.
L'économie de l'île semble être restée assez traditionnelle. La majeure partie de la population vit dans des villages ou de petits bourgs et s'occupe de travaux des champs. Le plateau de Cadel est par ailleurs très fertile, ce qui permet de nourrir une population plutôt nombreuse en regard de la taille du royaume.
Une particularité de Cadel est l'absence de métal en son sol. Pour pallier ce manque la population a développé un usage du bois particulier - d'où la présence de forêts entretenues sur toutes les terres incultes. Le bois est endurci par les artisans du bois grâce à la Magie : les outils et les armes sont ainsi faits de bois.
Les artisans pratiquent généralement un métier qui semblerait fort étrange à nos artisans continentaux, en mêlant dans leurs ouvrages des techniques manuelles et magiques ; cela donne aux produits fabriqués en Cadel un degré de finition et d'excellence très particulier qui explique pourquoi les marchands de l'île s'enrichissent depuis que le commerce avec Oneira a été établi.
Mercinel est incontestablement le centre économique de l'île, puisque la cité est la seule interface avec Oneira. C'est désormais là que les fortunes se constituent, contribuant à marginaliser la vieille noblesse établie à Cintai. C'est également ici que se trouvent tous les étrangers dont certains se sont installés à demeure dans l'Amenegnis, se livrant à des trafics lucratifs entre Cadel et le continent. Les importations de métaux et de pierres précieuses, richesses minières inconnues jusqu'à une date récente dans l'île, sont en plein essor.
La particularité du commerce est liée à la géographie. L'île ne pouvant être trouvée à coup sûr qu'à l'aide d'un navigateur originaire de Cadel, ce sont des navires du royaume qui assurent le gros du trafic maritime et les équipages continentaux qui parviennent à débaucher un navigateur sont extrêmement rares. Cela explique que les retombées du commerce soient si importantes en Cadel : le produit des échanges n'est capté par personne d'autre que ses habitants et les négociants qui s'implantent en Cadel doivent passer malgré tout par des navires sur lesquels leur contrôle est limité.
Extrait de Cités des Etoiles, par Kal-Nërlenci.