Généralités sur Tor-Keralm




Détail d'un vitrail de Beragen, par SLo.

l est difficile de parler "du pays" de Tor-Keralm, car il est en vérité plus judicieux de parler "des pays" de Tor-Keralm... Ce territoire est sans doute l'un des plus spectaculaires d'Oneira : l'intégralité de sa superficie est occupée par l'important massif montagneux de Derkilan qui regroupe plusieurs des plus hauts sommets oneiriens. Pour autant, les vallées de Tor-Keralm plongent parfois jusqu'au niveau de la mer, ce qui occasionne un paysage extrêmement abrupt, aux parois presque verticales impossibles à gravir. Dans des temps très anciens, les sommets de Tor-Keralm devinrent le refuge de nombreux dragons délogés d'autres régions du monde. Aujourd'hui, les humains se partagent le territoire, une partie vivant dans les vallées, et une autre dans d'inconcevables villes perchées sur les pics acérés des Derkilan : on peut ainsi parler de deux pays ("tor" signifiant "deux" en oneirien) : celui des vallées, Syr-Keralm et celui des sommets, Drar-Keralm.
C'est la présence des dragons qui poussa les premiers keraliens à s'intéresser aux sommets où os, écailles et autres reliques inévitables sur les lieux d'habitation des dragons étaient autant de promesses de ressources magiques très prisées partout en Oneira. Or, les sommets étant presque tous inaccessibles, la seule solution pour les keraliens, pour l'essentiel originaires d'Ar'Mirë'Ys où se trouvent depuis toujours les grandes écoles de dressage, fut la domestication des dragons. Rapidement, les dragons étant trop à l'étroit dans les vallées, les keraliens les suivirent sur les sommets, assurés dès lors d'excellents moyens de transport pour relier les deux parties du pays. Les "nids" des dragons (d'autres parlent, comme en bien d'autres régions d'Oneira, d'antiques cités des Bâtisseurs, ou encore de palais bâtis par les Grands Anciens avant l'apocalypse des Dragons) semblèrent tout désignés pour la construction de villes qui furent souvent creusées à même la roche et occupent parfois partiellement d'immense cavernes (d'anciennes "pièces" des palais dragonniques ou des Bâtisseurs ?), ainsi plus à l'abris des conditions climatiques et du froid extrême sévissant aux hautes altitudes. Les habitants des sommets (les drar-keraliens, par opposition aux syr-keraliens) basent entièrement leur survie sur l'assistance des syr-keraliens et la présence des dragons et ce qui occasionne un attachement peu commun entre les humains et leurs animaux. Cet attachement a poussé certains humains à ne réellement plus quitter leurs dragons : d'immenses écoles de dressage (à défaut d'un meilleur nom) furent créées, formant humains et dragons à toutes sortes de métiers, dont essentiellement ceux de messagers et de guerriers. Les messagers et porteurs keraliens sont réputés partout en Oneira pour être les plus rapides et les plus fiables de tous, capables, de plus, de porter de lourdes charges sur de très longues distances. Les soldats, quant à eux, sont parfois engagés comme mercenaires au cours de certains conflits, mais consacrent l'essentiel de leur temps à limiter les volontés de conquête de l'Ar'Lumn (conquête de Tor-Keralm ou de l'Ar'Ollin, les keraliens n'hésitant pas non plus à soutenir Mar'Ev'Syra, Mar'Ini'Uyn, l'Ar'Mirë'Ys ou même les pays longeant la plaine de Dhara) : l'antagonisme entre Tor-Keralm et l'Ar'Lumn est séculaire : il provient du fait que les deux pays partagent le même culte, celui de la Lumière, mais sous deux aspects différents : l'Ar'Lumn se prétend héritier de l'ancien savoir des fées, tandis que Tor-Keralm dit naturellement tenir le sien des dragons. Si à ce jour le culte de la Lumière ne tient plus qu'une place secondaire dans la culture keralienne, la rancune entre les deux pays tient toujours bon et reste prétexte à de réguliers affrontements. Si l'artisanat est extrêmement développé dans les cités des sommets (notamment en matière de sellerie, etc...), il reste que les vallées restent les indéniables garantes de la culture keralienne et, par conséquent, sont farouchement protégées par les armées des sommets.
L'espace étant bien entendu fort rare et les conditions de vie extrêmement rudes en Drar-Keralm, il revient aux habitants des vallées de trouver ou de produire de quoi nourrir humains et animaux des cités des sommets, activité à laquelle les habitants des vallées consacrent presque tout leur temps. Notons que les syr-keraliens ont également développé une fantastique habileté pour la sculpture et un fort intérêt pour les pigments : les vallées étant presque toujours privées de soleil, essentiellement en hiver, et souvent enneigées, tout le territoire est jalonné de piquets sculptés, aux couleurs vives, souvent enchantés et agrémentés de cloches ou de grelots, donnant aux égarés dans la nuit ou la neige de précieuses informations sur leur position. De même, tout le pays est parsemé de petits abris en pierre à l'usage des voyageurs, à l'intérieur desquels on trouve de la nourriture et un nécessaire pour faire et alimenter un feu, abris contrôlés et entretenus presque quotidiennement.
La communication entre le haut et le bas fut naturellement l'une des grandes préoccupations des Keraliens : ceux des vallées se spécialisèrent vite dans l'élevage d'oiseaux de proie, essentiellement de faucons keraliens ou autres races similaires, qu'ils utilisent pour porter des messages ou de petits colis dans les cités des sommets. Cette spécialisation se changea vite en véritable passion pour les syr-keraliens qui développèrent pour leurs oiseaux le même amour que celui des drar-keraliens pour leurs dragons, et influença énormément dès lors la culture et l'artisanat des vallées.

Extrait des Chroniques géographiques, par Gwanys, Illéranyne.