Les pièces bardiques




Détail d'une couverture de contes fylias, par SLo.

e tous les divertissements proposés par les bardes, les pièces bardiques sont peut-être les préférées des oneiriens. Il s'agit d'une histoire, généralement basée sur des faits réels, le plus souvent historiques ou contemporains, racontée par plusieurs bardes dont chacun choisit l'un des protagonistes et se fait sa "voix" dans le récit. Le participant raconte ainsi l'histoire selon le point de vue de son personnage, et peut être à tout moment interrompu par un autre personnage qui contredira sa version des faits, apportera des précisions ou s'emparera du récit. On dit souvent en riant que sur dix pièces bardiques commencées, une seule parvient à s'achever, car il est très courant que les versions d'une même histoire diffèrent tellement d'un barde à l'autre que le récit est interrompu et tourne en débat passionné auxquels les spectateurs prennent souvent part. Ainsi, l'on dira d'une chose qui traîne en longueur ou d'une discussion qui n'aboutit à rien qu'elle se "termine en pièce bardique".
Une pièce bardique ne peut exister qu'avec le concours d'au moins deux bardes, et les plus grandes en comptent jusqu'à une quinzaine (on parle cependant de la grande pièce bardique qui fut donnée à Illéranyne en 1039 dans le cadre des festivités entourant le mariage d'Illénira et de Bren dans lequel la population avait reconnu la réincarnation de Kelwan, et qui attira la participation de quelques trente-deux bardes durant près de quatre jours). Si le récit est naturellement privilégié, il n'est pas rare que les bardes s'accompagnent d'un instrument (ou que les participants à la pièce se fassent accompagner par un tiers). Contrairement aux récits bardiques classiques, ils ne s'en servent pourtant pas pour créer une ambiance ou intensifier le récit, mais seulement pour jouer un thème musical, généralement simple, propre à son personnage et qui permettra clairement de l'identifier, notamment dans les pièces bardiques comptant de nombreux personnages.
Traditionnellement, on ne prévoit pas une pièce bardique. Son succès dépend de son caractère imprévu et de la spontanéité de ses participants. Néanmoins, les discussions entre bardes avant de commencer la pièce sont suffisamment longues pour que toute une ville ait le temps d'être mise au courant de l'événement à venir, et de s'y préparer. Dans certains lieux, pourtant, les pièces bardiques sont extrêmement courantes, presque quotidiennes. On pourra ainsi citer la place des Coupoles à Eledinn dans la Principauté de Musä, la Kymar-demorii de Netria au Pyrelos, et bien sûr la place des Cloches de Deloray à Illéranyne.



La Guerre des Gardiens


C'est le classique par excellence des pièces bardiques. Incontournable, elle est probablement la plus fréquemment jouée depuis l'an 0, et l'une des seules à être organisée souvent, à l'initiative de bardes passionnés par ce récit. Elle comporte, comme on peut s'en douter, huit personnages imposés : Oasanë, Shae, Kaly, Hénéo, Elira, Dar, Onirian et Erana, mais en fonction des régions il arrive qu'on y ajoute d'autres personnages, comme Kaena, dans le Nord d'Oneira, ou encore E'Dyrha au Sud-Est ou en Eranos. Successivement, les huit personnages se présentent et racontent, selon un texte qui ne varie que très peu, leur naissance et leur situation au commencement de la Guerre. L'ordre des premières interventions n'est pas aléatoire. Il dépend le plus souvent d'un contexte géographique (en Alakh'Sun, on fera commencer Hénéo, etc...), mais depuis quelques années, on donne la priorité à Elira, soit en référence à son extraordinaire ascendance, soit encore pour honorer les rumeurs faisant d'Illénira, personnage on ne peut plus populaire actuellement, son incarnation. La Guerre des Gardiens est presque systématiquement instrumentalisée, et chacun de ses huit personnages principaux possède un thème musical qui ne varie pratiquement pas d'un barde à l'autre et qui est connu de tous les oneiriens, témoin de la grande popularité de la pièce.

L'histoire d'Illénira et de Kelwan


L'Histoire d'Illénira et de Kelwan fait partie, depuis 1021, des pièces bardiques les plus largement représentées et les plus appréciées. Nulle part en Oneira on ne se lasse de réentendre le récit de leurs diverses aventures dont les proportions vont croissantes à mesure que le temps passe. Dans ses versions les plus simples (et peut-être les plus appréciées, car elles rappellent merveilleusement l'habitude qu'avaient Illénira et Kelwan de raconter eux-mêmes leur histoire, se contredisant souvent, notamment lors des différentes guerres auxquelles ils ont pris part), cette pièce bardique se contente de l'intervention de deux bardes, représentant naturellement Illénira et Kelwan, auquel on ajoute parfois un narrateur "contestable" (c'est-à-dire fréquemment contesté...), le plus souvent Boron, ou des personnages en fonction des épisodes joués. Il s'agit alors le plus souvent de Seytos et Kymara, d'Elayos et Loyane, de Gaen et Myrhana, de Tozerus et Saenor ou encore de Serana, Jernan et Kalev.
L'histoire d'Illénira et de Kelwan est à ce point longue et détaillée qu'elle n'est que très rarement, sinon jamais, représentée en entier (on dit pourtant qu'elle fut conduite à Illéranyne en 1039 à l'occasion du mariage d'Illénira et de Bren qui fut plus tard officiellement reconnu comme habité de l'esprit vivant de Kelwan, et qu'elle nécessita alors l'intervention de trente-deux bardes dans une représentation qui s'étala sur presque quatre jours ininterrompus). Ainsi, l'histoire d'Illénira et de Kelwan fut-elle découpée en une vingtaine de "chapitres" plus ou moins populaires selon les pays. On peut ainsi citer parmi les plus appréciés :
Le Coup d'Etat de Korros, qui raconte tout d'abord la naissance d'Illénira, puis comment elle fuit parmi les sagittaires en 1006 pour échapper au coup d'Etat de Korros, et comment en 1015 elle rétablit sur le trône d'Eranos la lignée royale,
La Guerre du Roban, qui opposa le Pyrelos à son voisin et durant laquelle l'enlèvement (ou la mort, selon les versions) de la princesse Illénira poussa Kelwan à envahir le Roban et à s'y faire couronner roi (à cette histoire très populaire au Pyrelos on ajoute souvent le mariage de Kelwan avec la princesse Mélira, puis la naissance de leur fils Jernan, et le désespoir sans nom d'Illénira),
La Fondation d'Illéranyne, qui raconte comment Illénira et Kelwan eurent l'idée de sa création et rassemblèrent les douze premiers cultes qui en furent les fondateurs, l'apparition miraculeuse des îles qui la composent et l'incroyable travail magique de construction de la ville et des bâtiments, et s'achève sur le passage des épreuves des cultes du Feu, de l'Air et de la Terre par Kelwan, et enfin par son grandiose mariage avec Illénira en 1023,
Le Premier Synode, qui est l'une des pièces les plus singulières puisque le nombre de participants, le texte et la longueur ne varient presque pas, la pièce étant basée sur le compte-rendu du premier Conseil du Synode du jour d'eilë sameï 1021 qui est rejoué presque en temps réel par 19 bardes se faisant la "voix" d'Illénira, Kelwan, Dowal, Gaen, Gwanys, Kaseros, Firéon, Myrhana, Thifano, Aelos, Logaïa, Nelara, Emyna, Anaron, Tolena, Zanay, Meal, Noron et Boeros,
La Malédiction du Destin, qui commence par le grand combat entre Illénira et E'Dyrha, laquelle avait pris possession de Kelwan et causa la mort de celui-ci à la suite de laquelle Illénira prononça la malédiction qui lui valut, après la naissance de sa fille, un exil long de douze ans sur l'Oel'Selm. Selon les versions, la pièce se poursuit soit du point de vue d'Illénira, malade et rejetée par les dieux, et raconte alors comment elle recueillit et éleva Kalev, soit du point de vue de ses fidèles à Illéranyne qui militèrent pour son retour. Dans les deux cas, la pièce s'achève sur le retour d'Illénira et sa miraculeuse guérison, puis sur l'arrivée de Bren et la réintégration de ses souvenirs du temps où il était Kelwan.
D'autres versions, enfin, écartent la plupart des faits historiques pour se concentrer sur l'incroyable histoire d'amour d'Illénira et de Kelwan, dont les temps forts sont la prononciation du Grand Serment par Illénira en 1015, et de Kelwan en 1016, ainsi que les nombreuses et désastreuses interventions d'E'Dyrha ou encore la mort de Kelwan en 1023, puis son incroyable retour en 1039.
Il est enfin intéressant de noter que par respect on représente rarement l'histoire d'Illénira et de Kelwan depuis 1041, année depuis laquelle le malheur se précipite dans leur famille, avec la mort de leur fille Niteï en 1041, la disparition de leur fille Serana en 1042 et le procès, toujours inachevé à ce jour, de Jernan, fils de Kelwan et membre du Synode, cette même année.

La guerre de Thard


La guerre de Thard est actuellement la pièce bardique la plus populaire en Oneira. Très actuelle, puisque l'Ar'Thard n'est en paix avec l'Ar'Boeren que depuis 1044, sa représentation permet, outre un excellent divertissement, de se tenir au courant des récents événements et de se familiariser avec eux. Cette pièce bardique prend le plus souvent le point de vue de la résistance, fédérée autour du roi Boeros et de son jeune frère Ilenor, mais raconte aussi l'extraordinaire intervention du barde Keans (et c'est peut-être là une des raisons qui font de cette pièce une des favorites des bardes en ce moment) ainsi que l'histoire d'Elenis et d'Elinë, descendantes de la lignée de Kaena et dont on dit que c'est Keans lui-même qui les aurait placées au coeur de l'histoire (une autre excellente explication à la grande popularité de la pièce puisqu'il semble qu'il s'agisse là de la dernière grande intervention en date de Keans dans l'Histoire). Le nombre de personnages est très variable, Ilenor étant cependant le plus souvent repris. La plupart du temps, on se contente d'une pièce à trois "voix" : Ilenor, Boeros et Elenis, mais il n'est pas rare qu'on leur adjoigne Kern, autre personnage très populaire, ou, plus rarement, Elinë ou encore E'Dyrha ou l'un ou l'autre de ses généraux.