Le fidèle du culte des Ténèbres




Rigoureux et exigeant pour ses prêtres, le culte des Ténèbres ne l'est pas autant pour ses fidèles, du moins au regard de nombreux autres cultes oneiriens. Il n'exige ni service obligatoire à aucune période de la vie des croyants, ni aucune présence à aucun office, ni offrandes, ni prières, ni même l'observation contrainte d'aucune fête. Cette originalité tient essentiellement au renfermement des temples, difficilement abordables pour les non-initiés et peu propices à l'accueil des profanes.
Le culte attend de ses fidèles essentiellement une foi profonde qui ne nécessite aucune preuve, le soutient moral du temple et la compréhension de ses justes desseins, la bienveillance envers les prêtres qui pourront être accueillis et nourris sans contrepartie par tout fidèle des Ténèbres, le respect des connaissances et des mystères détenus par les membres initiés du culte, la présentation rituelle des enfants au temple pour leur recensement et surtout pour leur protection (via l'établissement de l'oracle de naissance, la révélation du nom de l'âme et la conception de l'enolin), le recours à un prêtre lors de la mort d'un fidèle.
Dans les faits, bien des fidèles du culte se rendent régulièrement au temple, car pénétrer l'enceinte sacrée et mystérieuse est considéré comme un honneur, mais on observe de très grandes variances d'une famille à l'autre, l'héritage et la fierté de la famille étant deux données importantes en Ar'Thard et en Ar'Boeren où le culte est pratiqué. Ainsi, certaines familles se feront une loi de ne déranger que le moins possible les prêtres et le temple et de s'en tenir éloigné, tandis que pour d'autres, il sera usuel, par exemple, d'envoyer avant leur union les jeunes hommes servir un mois parmi les modese, et les jeunes filles servir le même temps dans les infirmeries ou, plus couramment, parmi les enfants recueillis par le temple. La fierté des fidèles pour leur culte (essentiellement pour le Mulaten, rappelons-le une fois encore) fait que le temple n'a que très rarement à payer pour des services extérieurs ou pour la nourriture : de nombreux biens et services sont mis à la disposition des prêtres par les marchands ou les artisans tandis que bien des paysans cultivent une petite parcelle à l'usage exclusif du temple, ou encore élèvent avec les leurs les bêtes appartenant au culte.
Le retour du culte envers les fidèles est énorme, ce qui est méconnu de la plupart des oneiriens adeptes d'autres croyances. En effet, les prêtres et les neven au service des fidèles sont nombreux, dévoués et pleins de gratitude, n'hésitant pas à donner d'eux-mêmes pour soigner les fidèles ou éduquer les enfants et les accompagner dans la suite de leur vie. Ainsi, on parle souvent avec un sourire de prêtres "adoptés" (kan'relnen, ou, le cas échéant, neven'relnen) qui sont ceux des membres du culte dont l'une ou l'autre famille s'occupe particulièrement, le plus souvent car une amitié ou une affection a été tissée au cours de l'un ou l'autre événement.
Ce système est rarement compris par les oneiriens suivant d'autres croyances, mais les adeptes des Ténèbres prétendent que "Mulken y souscrit" par le biais de ce que l'on appelle la "prière d'appel". Cette prière (la fameuse "penche-Toi sur moi, Mulken, car ma détresse est grande ; puisse Ton oeil être attiré par moi...") est enseignée dès leur plus jeune âge aux fidèles. Il s'agit de formuler auprès de Mulken la demande d'envoyer un prêtre pour porter secours au demandeur. Si l'appel est fait avec suffisamment de sincérité et de détresse, l'appel sera entendu par les prêtres les plus proches qui n'auront d'autre choix que d'abandonner leurs activités pour y répondre le plus rapidement possible. Aucune tricherie n'est possible, car le moindre doute ou la moindre volonté de manigance provoque un refus de la part de Mulken.